Entretien avec Victoria Weidemann, Head of Buyer Success chez Casavo
Head of Buyer Success chez Casavo (start-up dans le secteur immobilier), Victoria Weidemann est titulaire d'un doctorat à l'EHESS en sciences sociales et littérature. Elle raconte comment, même dans un secteur éloigné de la recherche, son parcours à l'EHESS continue de nourrir sa vie professionnelle.
Pourquoi avez-vous choisi l’EHESS ?
Entre 2005 et 2008, j’étais en licence de littérature comparée à la LMU de Munich et à Paris IV. C’est à ce moment-là que j’ai connu une amie qui était déjà à l’EHESS en Master de sociologie et m’en a dit beaucoup de bien. Je voulais approfondir mon travail sur la théorie littéraire, en particulier sur l’herméneutique et Paul Ricoeur, alors que l’École proposait des séminaires qui étudiaient exactement ces sujets-là. Même si j’avais eu le concours international de l’ENS (que je passais en parallèle), j’aurais sûrement assisté à quelques-uns de ces séminaires. C’est donc tout naturellement que j’ai décidé de poursuivre ensuite aussi ma thèse à l’Ecole, en co-tutelle avec la FU de Berlin cette fois-ci.
Que vous a apporté l’EHESS dans votre vie professionnelle ?
Depuis 10 ans, je travaille dans des métiers qui sont relativement loin de la recherche et de la théorie littéraire. Je dirais qu’il y a pourtant deux façons dont l’éducation reçue à l’EHESS continue d’enrichir ma vie professionnelle actuelle :
Contrairement à certaines écoles de commerce, il ne suffit pas de réussir le concours d’entrée et de régler son année à l’EHESS pour obtenir le diplôme. Il faut d’abord être très autonome : chaque étudiant.e a un projet de recherche individuel sur deux ans et le planning des séminaires peut se composer de manière plutôt libre selon chaque spécialité. On y apprend forcément à être assez rigoureux et à bien organiser son temps, tout en défendant un projet intellectuel et en l’améliorant grâce aux retours reçus. En cela, un projet de mémoire ou même de thèse est assez similaire au projet de création d’une entreprise finalement.
En parallèle à ma thèse et jusqu’en 2020 j’ai majoritairement travaillé dans des fonctions de communication et marketing. Les cours de linguistique à l’EHESS ont été d’une valeur inestimable à cet égard. Ils me permettent toujours aujourd’hui de décoder n’importe quel acte de communication assez vite jusque dans la moindre nuance. Même si ce sont aujourd’hui les intelligences artificielles qui commencent à remplacer les rédacteurs humains à certains endroits, la structure et l’effet d’un communiqué de presse, d’un posting sur Linkedin ou d’un entretien annuel oral doivent tout à leur structure linguistique et il vaut mieux maîtriser ces éléments-là quand on prend la parole au nom d’une entreprise ou institution.
Pourriez-vous nous raconter votre métier ?
Plutôt que “métier” au singulier, c’est une suite de plusieurs métiers que j’ai eu la chance de connaître depuis que j’ai quitté l’EHESS. J’ai commencé dans les relations internationales, avec un focus sur les technologies de l’information et de la communication. Ensuite j’ai occupé des fonctions de spécialiste marketing, puis directrice marketing ou “CMO” comme on dit dans les start-ups. Il y a deux ans, j’ai voulu encore élargir mon périmètre d’action pour être encore plus proche des fonctions commerciales d’une entreprise. J’ai ainsi géré la stratégie des équipes Inside Sales (relation client) et en partie du recrutement. Aujourd’hui, je suis sur un poste qui s’appelle “Head of Ops”, et consiste à imaginer, mettre en place et rendre rentables les services et produits pour une partie de nos clients, en me servant de plein d’outils géniaux, de la data récoltée sur notre site et des équipes en contact avec les clients finaux. L’entreprise pour laquelle je travaille aujourd’hui compte environ 500 collaborateurs et opère dans le secteur immobilier, mais je suis aussi passée par un grand hebdomadaire politique, un fournisseur de solution pour les sites e-commerce et un grand groupe dans la traduction et les services linguistiques.
Auriez-vous rencontré une personne inspirante pour vous lors de votre parcours à l’EHESS ?
Pas qu’une seule ! Je pense notamment à Eléonore Merza, anthropologue spécialisée sur Israël et la première prof de FLE de l’EHESS à l’époque, pour son engagement politique et humain, mais aussi au philosophe Jean-Marie Schaeffer, qui a co-dirigé ma thèse ou encore à Thomas Piketty dont j’aurais fréquenté les conférences plus souvent si j’avais su que j’allais travailler essentiellement sur des sujets économiques et financiers 10 ans plus tard !
Victoria Weidemann a également participé aux premières « Rencontres métiers » de l’EHESS, en novembre 2022 au Campus Condorcet.
Commentaires0
Veuillez vous connecter pour lire ou ajouter un commentaire
Articles suggérés